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LA JEUNE FILLE A LA FLEUR

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Marc Riboud

1967

Prise par Marc Riboud lors d’une manifestation pacifiste contre la guerre du Vietnam, cette photo a fait le tour du monde et est toujours présente dans la mémoire collective. Retour sur une image iconique, symbole de paix : « La jeune fille à la fleur », connue également sous le nom « The Ultimate Confrontation : The Flower and the Bayonet » (La confrontation suprême : la fleur et la baïonnette).

Nous sommes le 21 octobre 1967 à Washington D.C. alors que des milliers d’activistes (on les estime à 100 000) se sont rassemblés devant le Pentagone pour manifester contre l’engagement américain dans la guerre du Vietnam. Cette guerre sanglante et largement désapprouvée par l’opinion publique dure déjà depuis plus de dix ans causant la mort de centaines de milliers de vietnamiens et de soldats américains. C’est l’époque de la génération hippie, du mouvement « Peace and Love ».

Jan Rose Kasmir, une jeune lycéenne de 17 ans vêtue d’une chemise à fleurs, se détache de la foule des manifestants pour s’approcher de la garde nationale et à quelques centimètres des soldats, elle brandit une fleur.

« La toute dernière photo que j’ai prise est la meilleure. Le cadre que je voyais dans mon viseur était le symbole de cette jeunesse américaine : une fleur tenue devant une rangée de baïonnettes. » Marc Riboud

La combinaison du geste de Jan Rose Kasmir, de son regard triste et du parti pris visuel de Marc Riboud renvoie une image d’une intensité rare.

La construction de cette photographie intimiste est basée sur une opposition : la vie contre la mort, la paix contre la guerre, la solitude contre la multitude, le flou contre le net. Le photographe y laisse sa marque de fabrique : un cliché argentique en noir et blanc, le respect de la règle des tiers et une parfaite maitrise des lignes de force de l’image. Au premier plan Jan Rose Kasmir, intrépide, le regard triste, fait face aux baïonnettes auxquelles elle tend une fleur. Les premiers soldats sont hors cadre, on ne distingue que leurs armes, tandis que la fin de la rangée de soldat et la foule de manifestants sont flous. Le point de vue adopté est neutre, notre regard est tourné vers le centre de la confrontation ce qui renforce le pouvoir de la composition.

Seulement quelques photographes sont présents ce jour-là, l’évènement tient à coeur à Marc Riboud qui travaille pour l’agence Magnum et suit de près la guerre du Vietnam en photographiant les évènements du côté américain aussi bien que du côté vietnamien. L’existence de « La jeune fille à la fleur » a tenue à une pose sur la pellicule du photographe.

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« Je photographie avec frénésie, la nuit tombe, j’épuise mes films, quand cette jeune fille, seule face aux baïonnettes, dessine avec une fleur le symbole de la jeunesse américaine. Cette photo est la dernière de mon film. »

Prise dans son élan, Jan Rose Kasmir n’a pas conscience que son geste est en train d’être immortalisé. C’est a posteriori qu’elle découvrira dans la presse qu’il est devenu symbole de bravoure et un symbole universel de paix.

« Il y a une tristesse infinie sur mon visage au moment où Marc prend la photo. (…) J’ai réalisé que les soldats étaient des jeunes hommes. Ils auraient pû être un rencard, ils auraient pû être mon frère. C’était un geste de prière. »

Le consensus social et esthétique qui s’est établit autour de « La jeune fille à la fleur » l’a hissée au rang d’image-icône et la rend aujourd’hui encore, présente dans la mémoire collective. Devenue virale, son côté absurde (le combat d’une fleur et d’une baïonnette) en fait une photographie chargée de significations, de projections et d’émotions.

Une autre photographie de Marc Riboud montre Jan ce jour-là les bras déployés à quelques centimètres des armes des soldats, en signe de pacifisme :

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